Conférence réalisée par Alain CAPPY
Mardi 21 Novembre 2023
LA VISION HUMAINE
L’œil est la première étape du système visuel. Il sert de capteur, commence à coder les images transmises par le nerf optique vers le cortex visuel, qui se situe derrière la tête. Le cortex va traiter les informations, interpréter les images.
Les pathologies oculaires ou défauts visuels sont les troubles de la vue qui vont empêcher une personne de voir un objet net : la myopie : l’image est nette en avant de la rétine, l’hypermétropie : l’image est nette en arrière de la rétine, la cataracte : opacité du cristallin, la presbytie : diminution de l’élasticité du cristallin. Elles se corrigent par le port de lunettes ou opérations au laser.
La rétine, c’est un capteur, composé de photorécepteurs et de cellules (neurones). Les photorécepteurs sont des cônes ou des bâtonnets. Ils captent les signaux lumineux et les transforment en signaux électriques. Le capteur code et transfère au nerf optique. La lumière traverse les neurones.
Cônes et bâtonnets ont des spécificités : les cônes permettent la vision diurne, colorée (il y a trois types de cônes, les bleus, les verts et les rouges), ils sont peu sensibles, ils sont au nombre de 3 à 5 millions ; les bâtonnets permettent la vision nocturne, ils sont très sensibles (100 fois plus que les cônes), ce qui permet de voir dans la pénombre et proposent une vision en noir et blanc seulement ; ils sont au nombre de 100 à 120 millions.
Ils sont situés différemment sur l’œil : le cône est sur la macula, surtout en son centre, la favéa. La zone où l’on voit de la couleur est toute petite.
Les bâtonnets sont surtout en périphérie.
Les photorécepteurs captent la lumière et la transforment en signaux électriques
Pour traiter les images, il y a trois types de cellules : horizontales, bipolaires et amacrines.
Les cellules de la rétine sont des neurones. A l’entrée il y a des signaux électriques, à la sortie un long filament qui va se terminer par l’arborisation terminale et va vers d’autres neurones.
La rétine détecte les contrastes et les mouvements. Les cellules horizontales, bipolaires et amacrines prétraitent des images transmises aux cellules ganglionnaires. Les axones (prolongement d’un neurone) des cellules ganglionnaires forment le nerf optique. Le nerf optique mesure plusieurs centimètres de long pour 4 mm de diamètre Il comporte environ 1,2 millions d’axones. Il y aura passage par le thalamus pour aller au cortex. Toute altération du nerf optique crée une déficience visuelle (ex : glaucome, les fibres du nerf optique sont écrasées). Chaque axone transporte sa propre information.
La partie de la rétine où s’insère le nerf optique constitue la tache aveugle.
L’image rétinienne est inversée par rapport à la scène. Elle comporte des imperfections : nette au milieu et floue autour.
Pour reconstruire les images, deux éléments sont importants : les saccades oculaires (bref et rapide mouvement des yeux), pour avoir une image nette et colorée, et le cortex visuel. Son fonctionnement a été découvert en 1970. Le Dr David Hubel a marqué l’histoire scientifique en découvrant, avec son collègue Torsten Wiesel, les mécanismes du cerveau visuel. Leur découverte fût couronnée du prix Nobel en 1981.
Le cortex visuel, situé à l’arrière du crâne, est l’organe du traitement des images par le cerveau. Les signaux optiques sont transmis par le nerf optique sous forme d’impulsions.
Le cortex est une petite couche à l’extérieur du cerveau ; c’est ce qu’on appelle la matière grise. Il a 2 à 3 mm d’épaisseur, il est plissé. Si on l’extrait, il aurait une surface de 60×60 cm. Il comporte 100 millions de colonnes corticales (groupe de neurones), chaque colonne possédant une centaine de neurones. C’est un processeur élémentaire du traitement de l’information. Toutes les colonnes vont être interconnectées : c’est le connectome. L’ensemble de toutes ces connexions forme la matière blanche du cerveau.
Il y a différents niveaux dans le cortex.
V1 va reconnaître des lignes simples, V2 va intégrer les détails pour en faire un objet, V3 plus complexe, va reconstituer un visage par ex. De V1 à V6 on va passer de la reconnaissance de lignes (bâtons), à la reconstitution d’une lettre, à l’identification d’un mot, à la composition d’une phrase, à l’élaboration d’un concept.
Les connexions du cortex sont hiérarchiques. On passe de la vision à l’abstraction au fur-et-à mesure qu’on s’éloigne de l’œil (pour aller au cerveau). A l’inverse, le rôle de la prédiction permet d’associer un son à une vision par exemple. La prédiction, qui représente un modèle du monde qui nous entoure, est essentielle à la notion « d’intelligence ». L’interprétation vient parfois changer ce que l’on a l’impression de voir. L’interprétation d’une image peut être fausse : illusion d’optique.
On a ainsi : œil (capteur)ànerf optique (traitement de l’info)àcortex visuel V1V2(interprétation)àcortex visuel V3V4(mémoire, modèle prédictif).
LES MALADIES DE LA RETINE ET LEURS TRAITEMENTS
La rétinite pigmentaire :
C’est une maladie rétinienne dégénérative se caractérisant par une perte progressive de la vision. Cette maladie génétique (altération des gènes impliqués dans le fonctionnement des photorécepteurs) et héréditaire conduit généralement à la cécité. Il s’agit d’une dégénérescence lente bilatérale de la rétine qui concerne essentiellement les bâtonnets, entrainant une baisse de la vision nocturne. Elle touche autant les hommes que les femmes. Elle représente 1 cas sur 3500 naissances, soit 30000 cas en France. Elle apparaît à tout âge, et notamment entre 10 et 30 ans.
La DMLA : dégénérescence maculaire liée à l’âge.
C’est une maladie chronique de la macula, causée par la dégénérescence des photorécepteurs. Les cônes sont détruits. Les cellules de la rétine et le nerf optique ne sont pas détruits. Il y a perte de l’image colorée au centre. Elle touche 1 million de personnes en France, soit 8% de la population. Sa répartition par âge est : 1% des personnes de 50 et 55 ans, 10% des 65-75 ans, et 25 à 30% des plus de 75 ans.
Comment cela se traduit : au début le cerveau compense la tache abimée puis on perd le centre jusqu’à ne plus avoir que la vision périphérique.
Les thérapies : elles sont médicamenteuses et cellulaires (thérapie génique, cellules souches). Elles visent à ralentir la progression de la maladie, non à la guérir.
Une autre voie se dégage : celle des implants rétiniens (photodiode). Soit sur la rétine, soit à l’arrière de celle-ci. La photodiode va capter la lumière. Le signal électrique va exciter les cellules vivantes. Elle permet au patient d’avoir 2/10ème de vue. Les systèmes actuels ont leur limite, coutent chers. Il faut apporter de l’énergie à l’implant, cela exige aussi un long temps de rééducation.
Une autre solution est proposée par Axorus, fondée en 2019 sur la base de travaux de recherche menés au CNRS et à l’université de Lille : un implant sous rétinien, alimenté par la lumière de la scène. La démonstration en laboratoire a été faite. La société développe une rétine artificielle, véritable neurone électronique permettant de restaurer l’acuité visuelle des personnes atteintes de maladies rétiniennes. Le neurone artificiel a été breveté par le CNRS.
C’est une avancée thérapeutique majeure à une échelle de temps de quelques années.
A long terme, il s’agit de fabriquer un système de vision artificielle compatible avec le vivant : la vision bionique. On peut remplacer l’œil par la caméra. On pourrait réparer une partie du cortex avec des neurones artificiels.
Il y a beaucoup d’autres applications, à long terme également : interface neurones/cellules musculaires, prothèses, traitement des blessures de la moëlle épinière. Il y a une percée majeure dans le traitement de la maladie de Parkinson : une neuroprothèse permettant de restaurer la marche…
C’est donc un voyage dans notre système visuel que nous a proposé Alain Cappy, porte ouverte sur un système extraordinaire de captation et décodage de l’image. Ce système peut connaître des imperfections, ou des dégénérescences, qu’il faut savoir atténuer. Ce faisant il nous a ouvert des portes sur d’autres avancées thérapeutiques grâce aux progrès technologiques.
Marie Pierre Fourdinier, le 21/11/23 Université du Temps Libre Pévèle Carembault